Viens voir ton nouveau professeur de Peace and Love, Iggy!

Une couronne de fleurs sur la tête, Solveight courait parmi les caravanes. Certains se retournaient sur le passage qui faisait l'effet d'un nuage blanc et blond et fleuri, et on lui demandait par moment ce qu'elle fabriquait. Candide, elle se contentait de répondre qu'elle allait voir Iggy. Certains se regardaient en hochant la tête, l'air de se dire que c'était une brave fille. Parce qu'il fallait sans doute beaucoup de volonté - et de motivation - pour tenter d'inculquer le mouvement hippie à Iggy. Mais elle était toujours motivée, et elle était persuadée qu'il y avait la graine hippie qui ne cherchait qu'à se développer pour devenir une jolie fleur, en lui. Une fleur hippie, pas comme celles qu'elle avait sur la tête! Elle cherchait donc la caravane, espérant retrouver la bonne. Parfois elle cognait aux portes, demandant si c'était la bonne caravane. D'autres fois, elle passait son chemin, sachant déjà que ce n'était pas celle d'Iggy. Elle soupira, agacée, après un moment, et se gratta la nuque, se demandant où il pouvait bien être. Puis elle entendit finalement un bruit qui sonnait tout doux à son oreille et elle gloussa, comme une petite fille. En fait, le bruit, c'était un miaulement. C'était Albert, le chat de Malvin. Elle devait être au bon endroit, puisqu'ils partageaient la même caravane. Sans même oser frapper, elle ouvrit la porte subitement, y trouvant Iggy couché sur son lit à faire elle ne savait quoi.

« Hé, Iggy! Tu vas bien? »

À première vue, Solveigh avait tout pour taper sur les nerfs. Grande, blonde à la silhouette élancée, c'était sans doute ses grands yeux bleus et ses taches de rousseur à peine visibles qui faisaient qu'elle n'était pas encore morte assassinée. Car elle avait un truc, un seul qui pouvait paraître énormément énervant. Une voix cristalline, suraigüe, et surtout, elle parlait tout le temps et très fort. Elle prit le chat qui était dans ses jambes et le posa sur une chaise, enlevant ses sandales style gladiateur avant de se jeter sur le lit, sur Iggy en même temps, rigolant de ce qu'elle venait de faire. Aucune considération pour lui, elle venait lui rendre visite pourtant. Sur un ton enjoué, comme à son habitude, elle lui demanda, taquine :

« Tu fais quoi? »

Elle plongea la tête dans ce qui s'avéra être un plomb qu'il se faisait et elle recula. Ça prenait toujours tout plein de concentration. Elle jeta son petit sac à elle sur le lit. De l'herbe, juste ça. Avec Pilot elle avait fait des trucs bien plus fous que de l'herbe, mais c'était uniquement avec Pilot. Elle éclata de rire, observant Iggy qui se concentrait énormément comme un artiste. Elle lui souriait toujours, alors qu'elle ne disait plus un mot - un moment de répits, enfin? Pas pour longtemps. Elle tapota l'épaule d'Iggy avant de lui demander sur ce ton enfantin qui la caractérisait tant:

« Dis, je peux rester avec toi?» Elle regarda la caravane et aperçu le poster d'une femme qui bien sûr lui était inconnue. Elle grimaça. « Beurk elle est moche la dame en papier. » Elle sortit son bong et un peu d'herbe, et encore une fois tapota sur l'épaule d'Iggy. « Dis Iggy? J'peux fumer? »

Elle lui fit les gros yeux lorsqu'il lui déclara presque méchamment que la fille en papier n'était pas moche, qu'elle pouvait rester et qu'elle pouvait fumer parce qu'il faisait de même. Il ne voulait pas être méchant, pourtant elle le savait. Elle était persuadée que Iggy avait un très bon fond, et qu'il pourrait devenir un vrai de vrai hippie. Mais pour ça, il faudrait lui apprendre. Elle s'assit au fond du lit, observant Iggy rouler alors qu'elle préparait son butin, s'activant. Elle était plutôt fière de son bong. C'était ses parents qui le lui avaient offert lors de son onzième anniversaire. Parce que onze, c'était un superbe nombre. C'était un bong en verre avec le réservoir dessiné avec plein de couleurs. C'était elle et Pilot qui l'avaient personnalisé avec des pochoirs. Ils se prenaient pour de véritables Dahli, et ils avaient passé des heures pour faire un résultat sublime. Ils avaient dessiné la maison et les champs autour de celle-ci. Tous les membres de leur petite commune se tenaient par la main et il y avait un joli arc-en-ciel qui démontrait le bonheur de tous. C'était le bon temps. Elle regarda Iggy, lui adressant un sourire naĩf, et sortit de son sac une fournée de Big Bud.

Elle plaça délicatement et minutieusement les cocottes dans le foyer, les compactant bien pour ne rien gaspiller. Elle allumait bientôt le bong et quelques minutes plus tard, elle plaçait sa bouche contre l'ouverture, inspirant la fumée pour ensuite la souffler lentement et doucement. L'herbe était bonne et forte. Elle avait toujours de la bonne herbe. Elle tendit gentiment son bong à Iggy. « Tu en veux? C'est de la Big Bud. Elle est super. » Elle était un peu rouge, pas qu'elle était embarassée, mais plutôt parce que l'effet commençait tranquillement à faire son chemin. Elle s'allongea sur le lit d'Iggy, reprenant son bong en fixant les dalles du plafond. Elle replaça doucement sa petite robe blanche comme il faut, ne voulant pas qu'il puisse voir sous sa robe. C'était une habitude de fillette. Elle soupira, prenant une nouvelle longue latte de fumée, et après de longues secondes, ou peut-être minutes, elle expira doucement. « Dis Iggy, pourquoi t'es souvent de mauvais poil? »